Gustav Meyrink (Cahiers de L'Herne)

L’œuvre de Gustav Meyrink, étrangement méconnue pendant si longtemps, n’a pas encore été totalement traduite en français. Pourtant, ses romans essentiels - le Golem, l’Ange à la fenêtre d’occident, le Visage vert, le Dominicain blanc et la Nuit de Walpurgis - ont rencontré un succès d’une force souterraine peu commune.
Né à Vienne en un moment de pourrissement et de recherches passionnées, Meyrink, grand amateur d’Edgar Poe, de Hanns Heinz Ewers et plus encore de Hoffmann, a appartenu à ce cercle de Prague dont on a surtout retenu les noms de Kafka, Rilke, Max Brod et Werfel, mais qui comptait des personnalités fort singulières telles que Paul Leppin et Hermann Grab.
Profondément marqué par cette ambiance de fin d’un monde, Meyrink a tenté de franchir le pont de ses hantises, de ses phantasmes, afin de découvrir de l’autre côté, comme dira Alfred Kubin, un autre langage, une autre dimension humaine et - pourquoi pas ? - des sommets et des abîmes de conscience jusqu’alors inexplorés en Occident.
C’est ainsi que l’écrivain et l’ésotériste sont chez Meyrink indissociables, et qu’il a trop souvent été tenu pour une manière d’occultiste suspect, ce qui a parfois nui à la connaissance de sa véritable dimension, témoignage à la fois très délirant et très pragmatique de son temps. Cet alliage de fantastique et de réalisme confère à son œuvre un ton parfaitement original, si bien que toute comparaison avec celle d’un Lovecraft, par exemple, ne ferait qu’ajouter à une confusion que nous croyons trop épaisse. 
Gustav Meyrink est un révélateur, une chambre noire dont il convient de s’approcher avec prudence. Ironiste redoutable, qui manie le sarcasme avec une délectation parfois inquiétante. Ce Cahier lui rend hommage.Textes de Gustav Meyrink : L’anneau de Saturne, Le Cardinal Napellus, Mon éveil à la voyance, L’Horloger, Préface au Livre du Dieu vivant de Bô Yin Râ, Correspondance.